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La Forme poétique du monde. Anthologie du romantisme allemand (éditions José Corti, 2003)
Cette anthologie conçue par trois jeunes
spécialistes (Olivier Schefer, Laurent
Margantin et Charles Leblanc) comblera une
lacune tant par les présentations de ce
que fut le romantisme allemand que par
l'ampleur des auteurs et des oeuvres
citées (la grande majorité étant inédite).
Les chronologie, bibliographie, index,
permettront aux lecteurs de circuler
aisément dans l'ouvrage.
Le romantisme ne tient pas en une formule
ou en un axiome. La célèbre lettre de
Friedrich Schlegel confiant à son frère
qu'il lui faudrait 2000 pages pour coucher
sa propre définition du mot romantique
est, dans toute son extravagance, une
illustration de l'inhérente ambiguïté
rattachée à ce concept.
Dans l'histoire littéraire, peu de mots
ont été autant galvaudés que celui de
romantisme. Le surréalisme, une fois ses
représentants disparus, a nourri le
discours et l'imaginaire publicitaires. Le
terme de romantisme, quant à lui, n'a
cessé d'être repris tout au long du dix-
neuvième siècle par des «descendants»
qui, souvent, ignoraient tout de ce
premier romantisme apparu en Allemagne à
la fin du siècle. Recouverte en quelque
sorte par les oeuvres et les discours
ultérieurs qui se réclamaient de cette
esthétique, la Romantik finit par
n'évoquer qu'un ensemble très vague de
notions littéraires, qu'une nébuleuse de
sentiments qui n'avaient que peu à voir
avec les premiers écrits de ses
représentants les plus illustres. Il se
produisit même ce phénomène curieux: on
en vint à interpréter, à lire, voire à
éditer ces derniers – qu'ils s'appellent
Novalis, Friedrich Schlegel ou Tieck –
simplement en fonction de l'idée confuse
qu'on se faisait du romantisme, mouvement
littéraire que l'on disait seulement
tourné vers l'univers du rêve et le
fantastique, se désintéressant du monde
réel.
Pourquoi revenir sur les traces du
romantisme? À quoi bon lire des auteurs
qui nous parlent de temps, de lieux et
d'espérances qui ne sont plus? Pour rêver
quelques heures, diront certains, fuir le
monde et nos tâches accablantes. Anywhere
out of the World. Mais le rêve est ici
l'envers de la raison, comme le corps la
doublure de l'âme. Les premiers
romantiques allemands nous fascinent parce
qu'ils furent les plus libres et les plus
inventifs de tous nos modernes.
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